Dans l’océan des moments romantiques que le cinéma nous offre, il y a des poissons qui brillent plus que les autres. Vous vous rappelez certainement du cri passionné de Billy Crystal à Meg Ryan dans ‘Quand Harry rencontre Sally’, ou de la fameuse scène « Je vole » de Titanic, et qui peut oublier le guimauve mais efficace « Tu m’avais eu à bonjour » de ‘Jerry Maguire’ ? Ces scènes iconiques, ces moments quasi-mystiques nous font savourer ces films romantiques, nous permettant ainsi de vivre, par procuration, cette délicieuse sensation de tomber amoureux.
Habituellement, ces scènes romantiques sollicitent une déclaration d’amour, un baiser passionné, ou une expression manifeste d’affection et d’envie. Pourtant, une scène romantique réduite à un zoom sur une main est devenue un favori des fans, bien qu’elle n’invoque en rien ces clichés. Vous avez deviné, je parle de la fameuse « flexion de la main » de l’adaptation de 2005 par Joe Wright du classique de Jane Austen, ‘Orgueil et Préjugés’. Cette scène, qui ne dure que deux secondes, s’est imposée comme l’une des séquences les plus puissantes et les plus intenses du cinéma, certains allant jusqu’à la qualifier de scène la plus sexy sans être sexuelle.
Dans cette scène, Mr. Darcy (interprété par Matthew MacFadyen) tend brièvement la main à Elizabeth Bennet (jouée par Keira Knightley) pour l’aider à monter dans une calèche. À ce stade du film, les deux protagonistes sont sur la défensive après avoir commis une série de faux pas, même si leur attirance mutuelle est de plus en plus évidente. Pendant un bref instant, leurs mains se touchent, leurs yeux se croisent, et un éclair de reconnaissance mutuelle silencieux les traverse. Par la suite, alors que Darcy s’éloigne de la calèche, il flexe sa main — littéralement pendant deux secondes — et bien que ce geste puisse passer inaperçu dans la vie réelle, cet acte simple et pourtant fort en dit long sur ses sentiments.
Dans cette simple extension des doigts, on peut sentir la chimie, l’électricité, le désir, la tension – tout est là dans ses doigts tendus.
Selon le réalisateur Joe Wright, cette scène n’était pas prévue dans le scénario. Pourtant, c’était un moment crucial du roman. « C’est une subite prise de conscience, alors qu’ils se séparent, de ce qu’ils signifient l’un pour l’autre ou du trouble qu’ils ont provoqué chez l’autre », a expliqué Wright. Ce dernier affirme que cette extension de la main était une improvisation de MacFadyen, bien que l’acteur dise lui-même que c’est Wright qui avait remarqué ce geste en premier.
Wright confesse aussi que malgré ce qui semble être une scène réussie, il avait été déçu du tournage de ce jour-là, se sentant incapable de capturer l’essence de ce qu’il voulait dépeindre. Disons qu’il doute parfois plus de lui-même qu’il ne le devrait, car comme en témoignent les commentaires des fans, cette scène est la perfection même.
Pour célébrer le 20ème anniversaire de cette adaptation, le film sera rediffusé dans les salles de cinéma sélectionnées le 20 avril 2025. L’esthétique sublime de Pride & Prejudice de 2005 est renforcée sur grand écran, ce qui vaut certainement le déplacement. Joe Wright savait ce qu’il faisait avec ce film du début à la fin, flexion de la main comprise.